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Parole de chansons

17 février 2015

Vieux Frères Partie 2 (2015) Mancurat Juillet

  • Vieux Frères    Partie 2   (2015)

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17 février 2015

Parole de Juillet (1998)

Juillet (1998)

Vendredi 5 juillet 22h57
Je descends la rue dans la chaleur de la nuit pas mal de monde pas mal de bruit
Un léger souffle d'air tiède traverse mon t-shirt et glisse sur ma peau
Ça fait comme les caresses d'une ado timide

Les trottoirs et la chaussée sont pleins il y a de tout des blancs des turcs des kainfs des indiens des albanais des pakis
Des gens pouilleux des gens sapés des filles jolies
J'en croise une plus âgée que moi et je me dis que j'aimeras bien essayer une fois pour pas mourir idiot

Je circule entre les épiciers les taxiphones les kebabs louches les affiches de chanteurs du monde mondialement inconnus et les bars branchés où j'ai jamais trop su comment me tenir mais c'est pas grave si certains y sont bien alors c'est bien

Ça sent le cumin et le safran la bière renversée la cigarette la viande grillée ça sent l'été le vrai celui qui répare
Mais déjà je dois m’engouffrer dans la station c'est pas grave ce soir rien peut me toucher je flotte au-dessus du sol les planètes sont alignées

Dans les galeries pas de grosses surprises
Encore cette odeur douteuse
Et ces 4 par 3 toujours pas indispensables
Pour un film obscur qui fera sûrement un four une comédie raston
La énième tournée d'adieu d’un groupe de vieux musiciens aux cheveux teints

Pour des spectacles de jeunes comiques en théorie pas hyper marrants
Pour des marques de vêtements portés par des filles qui ont l'air d'avoir des problèmes avec leur père
Et une campagne pour la mobilité qui sensibilisera peut-être personne
Mais avec une actrice plutôt mignonne

Et là je recroise ces deux filles longilignes qui se tiennent par la main
Exactement les mêmes que j'ai vues hier près de chez mon oncle
Je trouve ça touchant et étrange autant que cet immense guinéen au bout du couloir
Qui braille avec une voix métallique comme un putain de cor tibétain

Une goutte d'eau croupie tombe des poutres Eiffel dont la peinture fait des cloques elle atterrit dans mon cou
C'est dégueulasse mais j'ai pas le temps de jurer
J'entends la sonnerie de la rame au loin
Ce soir rien peut me toucher je flotte au-dessus du sol les planètes sont alignées

Dans la rame un kosovar qui joue d'une trompette-violon bizarre
Je me demande quelle vie il avait avant
Tandis qu'il anime mon trajet
Et celui du groupe de ricains à côté
Ils ont l'air un peu perdus
Avec leur physique tout lisse de gros bébés du futur

J'arrive à mon changement je passe devant les vendeurs de fausses clopes à la sauvette qui courent qui crient presque jour et nuit
Ça m’effrayait parfois quand j'étais gamin et qu’on venait dans le quartier avec ma mère et les frangins
Mais maintenant ça va maintenant c'est cool

Je monte vers le quai de la plate-forme aérienne
Et à chaque fois que je suis là bizarrement
Je repense à cette fille avec qui j’ai fait l'amour pour la première fois
Elle habitait juste à coté
On m’avait dit que c'était un peu une traînée mais en vrai pas tant ça avait été une jolie nuit

Je laisse mes pensées dériver où elles veulent
Constatant avec satisfaction le plaisir d'arriver à faire rouler les images et les mots comme sur des colliers de perles
Mais j'oublie pas que je dois faire des chansons
Dans tous les cas ce soir rien peut me toucher je flotte au-dessus du sol les planètes sont alignées

J'ai 27 ans bientôt 28
C'est fou comme le temps file
J'ai 27 ans bientôt 28
Et je pourrais me dire que mes belles années sont derrière moi

J'ai 27 ans bientôt 28
Pourtant j'ai pas de regrets
J'ai 27 ans bientôt 28
Mais ce soir j'ai l'impression d'être en 98

Je sors et toujours la chaleur dehors
J'avance sous la voûte des marronniers qui font comme une tonnelle
Je serai bien allé dans les magasins pas loin chez ces mecs pas méchants mais un poil suffisants
Poser mes doigts sur un instrument mais c'est fermé et puis faut que j'avance

Tout d'un coup sortie de je sais pas où de la musique genre malienne mais chantée en espagnol
Ou peut-être de la folk indienne
En tous ças un truc que j’ai jamais entendu
Et j’aime bien on dirait "Dear Prudence" y a des drums rondes et mates et asynchrones

Ça intéresse pas beaucoup les blédards désoeuvrés qui traînent dans l'allée
On n’arrête pas le biz
Ça s'enjaille ça s'embrouille
Il y a une odeur nouvelle dans l'air depuis quelques temps une odeur d'apocalypse
Je me surprends à penser que le déclin est arrivé ça y est c'est pour nous

Et malgré tout je suis pas si inquiet
Après tout faut arrêter on a de la ressource on n'est pas les derniers burnés on va se démerder

Je suis arrivé en bas de l'immeuble terminus
Je dois monter
Ce soir rien peut me toucher je flotte au-dessus du sol les planètes sont alignées.

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